S6 – Dispositifs d'enseignement et savoirs transversaux.
Fabienne Briere-Guenoun  1, 2@  , Nicolas Sembel  3@  
1 : Apprentissage, Didactique, Evaluation, Formation
Aix Marseille Université : UR4671, Aix Marseille Université : EA4671
3 Place Victor Hugo13331 MarseilleCedex 3 -  France
2 : INSPE Aix-Marseille Université
Aix-Marseille Université
3 : Apprentissage, Didactique, Evaluation, Formation  (ADEF)
Aix Marseille Université : EA4671, INRP
3 Place Victor Hugo13331 MarseilleCedex 3 -  France

Ce symposium inscrit dans l'axe 2 du colloque vise à questionner les objets de savoir transversaux impliqués pluridiscipliniares au regard des dispositifs qui les portent. Nous rejoignons la lecture des différentes « évolutions pédagogiques » de Durkheim (1938/2013) privilégiant « l'intégration des objets d'enseignement à la croisée des disciplines » autour d'une « démarche d'investigation ». Cette dernière relève de l'enquête, de sa didactique (Ladage et Chevallard, 2011), de sa tradition pédagogique (Thiévenaz, 2019) et de sa sociologie collaborative (Baudelot et Robert, 2019), illustrant ainsi ses dimensions critique, argumentative et créative. La rencontre de ces dimensions avec l'écologie des disciplines scolaires entraîne des tensions et leur reconfiguration à l'échelle du système éducatif (Sembel, 2003), remettant en cause le compromis historique correspondant à la phase de scolarisation des savoirs scientifiques, source d'inégalités sociales (Lahire et al., 2019). 

Un mode opératoire nouveau tend à s'installer, qui met à l'épreuve la « porosité » du filtrage organisé entre savoirs scolaires et savoirs scientifiques, pratiques sociales de référence et situations scolaires. Les tensions inhérentes au refus de la sérialité scolaire habituelle, qui construit les savoirs scolaires en objets cloisonnés et fermés sur eux-mêmes, questionnent la légitimité didactique des savoirs dits transversaux encore peu identifiés, formalisés ni évalués. En instaurant un rapport au savoir intégré dans une démarche d'enquête et ordonné par elle, ces savoirs peuvent contribuer à dépasser les clivages entre disciplines scolaires. Malgré les difficultés de leur identification, les savoirs transversaux nous semblent d'ores et déjà essentiels dans le curriculum scolaire, sous réserve de les rendre visibles au sein des dispositifs où ils sont mobilisés. Nous faisons l'hypothèse de leur importance dans l'acquisition des compétences scolaires déclinées dans les prescriptions scolaires mais aussi de leurs potentialités de réduction des inégalités d'accès aux savoirs.

Nous souhaitons ainsi mettre en discussion les modalités de mise à l'étude de ces savoirs transversaux au sein de dispositifs spécifiques supposés les mobiliser en inscrivant cette réflexion dans un dialogue entre approches comparatistes en didactique (Ligozat et al., 2017) et sociologiques (Poggi et Brière-Guenoun, 2014). Certains de ces dispositifs sont rattachés à une ou plusieurs disciplines scolaires, tels que l'éducation artistique, le débat d'idées en éducation physique et sportive ou le débat scientifique ; d'autres ne relèvent pas de disciplines scolaires identifiées, tels que les Ateliers démocratiques pour une expression réflexive, le Dispositif « lycéens au cinéma » ou les dispositifs de formation universitaire à la démarche d'enquête. Il s'agit de questionner les conditions et modalités de déploiement de ces dispositifs au regard des savoirs transversaux impliqués. 

Comment identifier ces savoirs et leur densité épistémique dans certains types de situations d'enseignement ? Comment sont-ils mis à l'étude, étudiés et appris ? Peut-on caractériser les processus de co-élaboration de ces savoirs entre élèves/étudiants et enseignants ? Existe-t-il des particularités inhérentes à la construction du milieu didactique, à l'avancée du temps didactique et aux places respectives occupées par les acteurs au fil du temps (triplet des genèses, Sensevy, 2007) ? Peut-on mesurer l'impact de tels dispositifs au-delà de leur mise en œuvre sur l'acquisition des compétences scolaires des élèves, la transformation des gestes professionnels des enseignants, le rapport au savoir des élèves et du professeur ou encore sur les (in)égalités d'accès aux savoirs, etc. ?

La perspective comparatiste adoptée vise ainsi à identifier des traits génériques et spécifiques de l'étude des savoirs transversaux afin de contribuer à redéfinir les curricula en favorisant la circulation entre disciplines scolaires.

Références bibliographiques

Baudelot C. et Robert C. (2019). « L'enquête, mère de toutes les batailles », 1015-1022, Manuel indocile en sciences sociales. Paris : La Découverte.

Durkheim E. (1938/2013). L'évolution pédagogique en France. Paris, PUF.

Ladage C., Chevallard Y. (2011). « Enquêter avec l'Internet. Etudes pour une didactique de l'enquête. Education et didactique, 5, 85-116.

Lahire B. et al. (2019). Enfances de classes. Paris : La découverte.

Ligozat, F., Lundqvist, E. and andAmade-Escot, C. (2017). Analysing the continuity of teaching and learning in classroom actions: When the joint action framework in didactics meets the pragmatist approach to classroom discourses. European Educational Research Journal, 17(1), 147-169.

Poggi, M. P. et Brière-Guenoun, F. (2014). Ce qui s'enseigne en milieu difficile : tentative d'articulation des approches sociologique et didactique. Dans N. Wallian, M. P. Poggi, et A. Chauvin-Vileno (dir.), Action, interaction, intervention : à la croisée du langage, de la pratique et des savoirs (p.333-364). Bern : Peter Lang.

Sensevy, G. (2007). Des catégories pour décrire et comprendre l'action didactique. Dans G. Sensevy et A. Mercier (dir.), Agir ensemble : l'action didactique conjointe du professeur et des élèves (p. 13-49). Presses universitaires de Rennes.

Sembel N. (2003). Le travail scolaire. Paris : Nathan Université.

Thiévenaz J. (2019). Enquêter et apprendre au travail. Approcher l'expérience avec John Dewey. Dijon, Raisons et passions. 


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