École et musée, entre rupture et continuité
Cora Cohen-Azria  1, 2@  , Ana Dias-Chiaruttini  3@  
1 : Département des sciences de l'éducation
Université de Lille, Sciences Humaines et Sociales
2 : Laboratoire Théodile-CIREL EA 4354
Université de Lille, Sciences Humaines et Sociales
3 : Laboratoire d'Innovation et Numérique pour l'Education  (LINE)
Université Côte d'Azur (UCA)

Notre proposition de communication interroge le partenariat entre l'école et les musées et en particulier les contenus, au sens large (Daunay, Reuter, Thepaut , 2013) traversant les situations de visite au musée que nous reconstruisons comme des situations didactiques spécifiques (Cohen-Azria-Dias-Chiaruttini, 2014). Analyser les contenus permet l'approche comparative entre les institutions, dans la mesure où il n'y a pas de curriculum au musée. En revanche, lors de la visite scolaire les contenus se configurent absorbant des caractéristiques scolaires et muséales. Pour analyser ce phénomène nous avons avancé le concept de « continuum didactique » qui selon nous permet d'éclairer ce qui est spécifique à chaque institution et ce qui se transforme dans le cadre de la visite scolaire la plaçant ainsi dans un continuum ou des contenus se prolongent, se transforment ou pas.

La notion de continuum didactique laisse présager que la visite se situe dans un avant et un après : un avant qui prépare ; un après qui exploite ce qui a été fait et vu. Mais au-delà de cette dimension temporelle et programmatique des contenus travaillés lors de la visite au musée, se pose la question de la nature des contenus : sont-ils strictement muséaux, sont-ils scolaires, se réfèrent-ils aux disciplines enseignées à l'école ? Le continuum didactique permet ainsi de questionner le partenariat école-musée à travers les tensions (le musée n'est pas l'école et il possède des codes culturels différents), à travers ce qui se transforme et ce qui ne peut se transformer et qui caractérise chaque espace institutionnel (Sénecail, 2021). Poser ce partenariat en termes de rupture de manière exclusive, ce qu'est l'école d'un côté et ce qu'est le musée de l'autre (Caillet, Coppey, 1992, Jacobi, 1995, ...), ne permet pas d'identifier ce qui se joue réellement dans la situation didactique de la visite scolaire et d'identifier les contenus apportés par le musée, par les sujets et par la relation école-musée, qui est le contexte de la visite scolaire. Cela ne permet pas non plus de comprendre comment l'expérience du visiteur dans chaque contexte de visite scolaire ou familiale peut varier et être complémentaire, sans que l'une ne puisse remplacer l'autre. Le continuum didactique ne nie pas les différences entre les institutions, mais il permet d'analyser comment entre différence, rupture et continuité, la visite scolaire au musée se développe.

Pour saisir les contenus en jeu, nous travaillons sur deux dimensions :

-la première dimension s'enracine sur les représentations des élèves que nous reconstruisons à partir de leurs déclarations. 238 questionnaires ont été complétés par des élèves de cycle 3. Le questionnaire les interroge sur les contenus et les apprentissages qu'ils réfèrent aux visites scolaires au musée en comparaison aux visites muséales dans des contextes contrastés comme celui des visites familiales. Ils ont été également amenés à se positionner quant aux apprentissages disciplinaires dans les classes et durant les visites scolaires.

-la deuxième dimension s'appuie sur des observations filmées et retranscrites de classe au musée dans le cadre des visites scolaires (2) et de famille dans le cadre de visite familiale (2), dans un musée d'art et de sciences.

Ainsi, les contenus qui traversent ces situations sont étudiés aux prismes des références : scolaires, disciplinaires et muséales en prenant en compte des contextes de visite contrastés.

La confrontation des contenus déclarés et des contenus observés dans ces contextes nous permet de mieux identifier les tensions qui traversent la visite au musée et la façon dont les contenus se formalisent et peuvent être identifiés.

Cette étude s'inscrit dans une comparaison entre didactique des sciences et didactique du français, permettant de travailler sur des méthodologies, des concepts et notions partagés dans ces didactiques, mais également à partir des spécificités de ces deux disciplines de recherche, et notamment de voir comment la notion de continuum didactique trouve dans chacune des didactiques des références différentes.

 

Eléments bibliographiques :

 

Caillet Élisabeth, Coppey Odile, 1992, « Le faire savoir ou la délectation au musée », dans É. Faublée (dir.), En sortant de l'école... musée et patrimoine, Paris, Hachette, 103-110

Cohen-Azria Cora, Dias-Chiaruttini Ana, (2016) : La visite scolaire : un espace singulier au croisement de deux institutions, dans Cohen-Azria C., Chopin MP., Orange D., (dir.), Questionner l'espace. Les méthodes de recherche en didactiques (4), Villeneuve-d'Ascq, Presses Universitaires du Septentrion, pp. 133-148.

Daunay Bertrand, Reuter Yves, Thepaut Antoine (2013) : Les contenus disciplinaires. Approches comparatistes, villeneuve d'Ascq : Presses Universitaire du Septentrion.

Eidelman Jacqueline, Van-Praët Michel, 2000, La muséologie des sciences et ses publics, Paris, PUF, coll. « Éducation et Formation », 352 p.

Jacobi Daniel, Coppey Odile, 1995, « Introduction – Musée et éducation : au-delà du consensus, la recherche du partenariat », Publics et Musées, 7. 10-22.

Sénécail Alain, 2021 : Les contenus en didactique : cas des visites scolaires dans les musées de sciences, Thèse de doctorat soutenue à l'université de Lille

 


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